19 juillet 2004

20 juillet 1944 (J+44)

Aux États-Unis, la conférence monétaire internationale se poursuit à Bretton Woods. 
 
Dans les îles Mariannes, le bombardement sur Tinian s’accroît au fur et à mesure que l’artillerie de l’armée à Saipan devient disponible, en plus des attaques aériennes et des bombardements navals.
 
En Normandie, La 2ème armée britannique continue d’attaquer dans le sud et l’est de Caen.  Les forces allemandes, particulièrement les défenses anti-chars, ont ralenti l’élan des alliés.
 
En Allemagne, en ce matin chaud et ensoleillé, peu après 6 heures, le conspirateur et résistant allemand, le comte Stauffenberg, se dirige à l’aéroport de Rangsdorf accompagné de son adjudant major, le lieutenant Werner von Haeften.  Son porte-documents, bourré à craquer, renferme les papiers concernant les nouvelles divisions Volksgrenadier sur lesquelles il doit faire rapport à Hitler cet après-midi à 13h00, au « repère du loup » situé à Rastenburg en Prusse de l’est.  Une bombe à retardement, enveloppée dans un chemisier, est cachée entre les papiers de son porte-documents.
 
C’est une bombe identique à celle qui avait été placée dans l’avion du Führer, l’année précédente, et qui avait refusée d’exploser.  De fabrication anglaise, elle est mise en opération en brisant une capsule de verre contenant un acide qui dissout un petit fil d’acier, lequel relâche une pointe qui vient frapper le chapeau de percussion.  L’épaisseur du fil d’acier permet de contrôler le temps de retardement de l’explosion, la bombe de Stauffenberg est équipée du fil d’acier le plus mince qui sera dissout en tout juste 10 minutes.
 
L’avion de Stauffenberg décolle à 7 heures le matin et atterri à Rastenburg peu après 10 heures.  Le lieutenant Haeften ordonne au pilote d’être prêt à décoller pour le retour en tout tant après l’heure du midi.  Une voiture amène les deux hommes de l’aéroport jusque dans une région dense, humide et boisée en Prusse de l’est, aux quartiers généraux de Hitler.  Ce n’est pas un endroit facile d’accès autant pour entrer que pour sortir, la zone est protégée par trois anneaux concentriques de fils de barbelés électrifiés, de mines et est patrouillée jour et nuit par des troupes de SS fanatiques.
 
Après le déjeuner, Stauffenberg se rend à la rencontre du général Fritz Fellgiebel de l’OKW.  Fellgiebel est un des hommes clés du complot, Stauffenberg veut être certain que le général est prêt à signaler la nouvelle de l’attentat aux conspirateurs de Berlin, afin qu’ils puissent entrer en action immédiatement après l’assassinat d’Hitler.  Fellgiebel a comme mission d’isoler les quartiers généraux du Führer en coupant les lignes téléphoniques et les communications radios.
 
Vers midi, Stauffenberg se rend aux quartiers de Keitel, il accroche son chapeau et sa ceinture dans l’antichambre et entre dans le bureau du chef de l’OKW.  Keitel lui apprend qu’il devra être plus expéditif que prévu, car Mussolini doit arriver en train vers 14h30, la conférence d’Hitler a donc été devancée à 12h30 plutôt que 13h00.  Keitel conseille à Stauffenberg d’être bref dans son rapport, Hitler désire que la conférence se termine tôt.
 
Pendant que Stauffenberg explique à Keitel les grandes lignes du rapport qu’il va présenter à Hitler, il remarque que le chef de l’OKW jette des regards impatients à sa montre.  Quelques minutes avant 12h30, Keitel annonce qu’ils doivent quitter immédiatement pour la conférence, sinon ils seront en retard.  Les deux hommes sortent du bureau de Keitel, mais après quelques pas, Stauffenberg remarque qu’il a oublié son chapeau et sa ceinture dans l’antichambre et fait rapidement demi-tour avant que Keitel ne suggère que son adjudant major, le lieutenant von John, qui marche avec eux, aille quérir ses affaires pour lui.
 
Dans l’antichambre, Stauffenberg ouvre rapidement son porte-documents et brise avec ses doigts la capsule d’acide.  Dans 10 minutes la bombe explosera, à moins qu’une défaillance mécanique ne l’empêche.  Keitel, aussi brute envers ses subordonnées que lèche-bottes envers ses supérieurs, retourne vers son bureau pour crier à Stauffenberg de se dépêcher, ils sont en retard.  Alors qu’ils se dirigent vers la salle de conférence d’Hitler, Stauffenberg est d’une humeur géniale alors que Keitel est contrarié.
 
Stauffenberg remarque alors qu’ils ne se dirigent pas vers le bunker souterrain de Hitler, l’endroit où normalement se tient les conférences du Führer, mais plutôt dans une salle au-dessus.  Keitel lui apprend que l’endroit de la conférence a été changé, car la chaleur est insupportable dans le bunker.  Stauffenberg se dit que la déflagration de la bombe aura certainement moins d’impact dans cette salle que dans le bunker souterrain.
 
Néanmoins, comme le craignait Keitel, ils sont en retard, la conférence est commencée.  Alors qu’ils s’apprêtent à entrer dans la salle, Stauffenberg s’arrête un instant dans l’entrée pour dire au sergent major en charge du téléphone qu’il attend un appel urgent de son bureau de Berlin, il doit recevoir des informations de dernières minutes pour son rapport (tactique destinée à l’oreille de Keitel).  Il informe le sergent major qu’il devra être convoqué immédiatement lorsque l’appel arrivera.  Même cette information n’éveille pas les soupçons de Keitel, car il est très inhabituel, même pour un feld-maréchal, d’avoir l’audace de quitter la présence du Führer, sans d’abord avoir été congédiée par lui ou encore d’attendre que la conférence se termine et qu’Hitler quitte en premier les lieux.
 
Les deux hommes entrent dans la salle de conférence, quatre minutes se sont écoulées depuis que Stauffenberg a amorcé la bombe, il ne lui reste que 6 minutes.  La salle est relativement petite, environ 10 mètres par 5 mètres et elle renferme 10 fenêtres qui sont ouvertes pour faire entrer la brise, car la journée est très chaude.  Stauffenberg a très bien conscience que ces grandes fenêtres ouvertes vont atténuer la déflagration.  Au centre de la salle se trouve une table oblongue de 5.5 mètres par 1.5 mètres fabriquée de planches épaisses de chêne.  La table est de fabrication curieuse, car elle ne repose pas sur des pattes, mais plutôt sur deux larges socles placés aux extrémités et qui font presque la largeur de la table.
 
Lorsque Stauffenberg entre dans la salle de conférence, Hitler est assis au centre de la table (sur sa longueur) et il fait dos à la porte.  À sa droite se trouvent le général Heusiger, le général Korten et le colonel Heinz Brandt.  Keitel prend sa place immédiatement à la gauche du Führer, juste à côté du général Jodl.  Goering et Himmler ne sont pas présents à la conférence.
 
Pendant que Heusinger fait un rapport lugubre sur l’état du front russe, Keitel l’interrompt pour annoncer la présence du colonel von Stauffenberg.  Hitler jette un regard au colonel et le salue sèchement, il annonce qu’il entendra son rapport lorsque Heusinger aura terminé le sien.  Stauffenberg prend alors sa place à la table entre Korten et Brandt, à quelques mètres à la droite de Hitler.  Il dépose son porte-documents sur le plancher et le pousse sous la table afin qu’il s’appui sur l’intérieur du socle en chêne, il est à 2 mètres des jambes du Führer.  Il est maintenant 12h37, il ne reste que 5 minutes avant l’explosion, Heusinger parle encore, tout en pointant une carte étendue sur la table.  Hitler et les officiers sont penchés au-dessus pour l’étudier.
 
Personne ne semble avoir remarqué que Stauffenberg s’est esquivé, excepté peut-être le colonel Brandt, qui est lui-même penché au-dessus de la table pour mieux voir la carte.  Il remarque le porte-documents de Stauffenberg qui s’empêtre dans ses pieds et le déplace de l’autre côté du socle de la table.  Le lourd socle de la table est maintenant entre Hitler et la bombe, dont le fin fil d’acier est maintenant presque entièrement dissout par l’acide.
 
Keitel, qui est responsable de la convocation de Stauffenberg, jette un coup d’œil à l’endroit où le colonel est supposé être assis, car Heusinger a presque terminé son rapport.  À son grand mécontentement, le jeune colonel n’est pas à sa place et se rappelle ce que Stauffenberg avait dit à l’opérateur du téléphone.  Keitel sort de la salle pour aller quérir le jeune officier au curieux comportement.
 
Stauffenberg n’est pas au téléphone, le sergent dit à Keitel qu’il a quitté l’édifice à toute vitesse.  Keitel retourne dans la salle de conférence alors qu’Heusinger est à conclure son rapport sur la situation catastrophique du front de l’est.
 
À 12h42 précisément, la bombe explose.  Stauffenberg aperçoit la scène depuis un bureau situé à une centaine de mètres de là.  Des morceaux de chair humaine volent par les fenêtres, il ne fait aucun doute dans l’esprit surexcité de Stauffenberg que toutes les personnes présentes dans la salle de conférence sont mortes ou mourantes.  Il salue à la hâte Fellgiebel, qui est au téléphone avec les conspirateurs de Berlin et leur annonce que l’attentat est un succès, puis coupe la communication.
 
Stauffenberg doit maintenant quitter les quartiers généraux de Rastenburg vivant et rapidement.  Les gardes ont entendu l’explosion et ont immédiatement fermé toutes les sorties.  La voiture de Stauffenberg est stoppée, il sort de la voiture et demande à parler à l’officier de service.  En présence du garde, Stauffenberg téléphone, on ne sait pas à qui, parle brièvement, se retourne vers l’officier et lui dit : « Herr Leutnant, je suis autorisé à passer. »  Ce n’est que du bluff, mais ça fonctionne et Stauffenberg parvient à quitter Rastenburg,
 
La voiture de Stauffenberg file à vive allure vers l’aéroport, son commandant n’a reçu aucun signal d’alarme.  Le pilote est à réchauffer les moteurs lorsque Stauffenberg parvient à la piste.  En quelques minutes, l’avion décolle, il est environ 13h00.
 
Les trois heures de vol paraissent une éternité pour Stauffenberg, il ne peut rien faire sauf espérer que les conspirateurs à Berlin ont reçu le signal.  Son avion n’est pas équipé d’une radio longue distance qui lui aurait permis de rejoindre Berlin et entendre l’excitation qui y règne.
 
Son avion atterri à Rangsdorf à 15h45, descendu de l’avion, Stauffenberg court vers le téléphone de l’aéroport pour appeler le général Olbricht afin de savoir ce qui s’est passé pendant les trois heures de son vol.  À son plus grand dépit, on lui apprend que rien n’a été accompli à Berlin.  La ligne était si mauvaise lorsque Fellgiebel a téléphoné à Berlin peu après 13h00, qu’il n’était pas clair si Hitler avait été tué ou non.  Le signal Valkyrie n’a donc pas été donné.
 
Plus tard, un téléphone de Rastenburg au général Olbricht, permet à Stauffenberg d’apprendre qu’Hitler est toujours vivant.  Il est sévèrement secoué mais n’est pas sérieusement blessé.  Ses cheveux et ses jambes sont légèrement brûlés, son bras droit est contusionné et temporairement paralysé, ses tympans d’oreille sont perforés et son dos a été lacéré par une poutre qui lui est tombé dessus. 
 
Deux heures après l’explosion, le sergent qui opérait le téléphone informe les détectives de Himmler que Stauffenberg avait quitté précipitamment la salle de conférence, certains des participants se rappellent alors que Stauffenberg avait laissé son porte-documents sous la table.  Rapidement les indices sont rassemblés et Hitler sait maintenant que Stauffenberg est le coupable et qu’un coup d’état de préparait.
 
Pour l’instant, Hitler a autre chose en tête, il doit accueillir Mussolini dont le train doit arriver à 16h00, après avoir été retardé.  Plus tard, Hitler et Mussolini contemplent les ruines de la salle de conférence, Mussolini est complètement terrifié.  Hitler lui dit : 
 
« J’étais debout à cet endroit près de cette table, la bombe a explosé juste devant mes pieds.  Il est évident que rien ne peu m’arriver; il est indubitablement mon destin de poursuivre ma voie et compléter ma tâche.  Ce qui s’est produit aujourd’hui est l’apogée!  Ayant maintenant échappé à la mort, je suis maintenant plus convaincu que jamais, que la grande cause que je sers sera amené à terme malgré les périls. »
 
Plus tard dans la soirée, Stauffenberg, Olbricht, Beck et plusieurs autres conspirateurs sont placés aux arrêts par le général Fromm, celui-là même qui était au courant du complot depuis plusieurs mois, mais qui n’avait jamais accepté d’y participer, il n’en avait pas plus averti Hitler.  Fromm leur annonce qu’au nom du Führer, la sentence de mort a été prononcée et qu’ils ont quelques minutes pour rédiger une lettre à leur femme.
 
Après la rédaction de leur lettre, Stauffenberg, Olbricht et les autres sont amenés à l’extérieur dans une cour sombre et sont exécutés. 

1 commentaire:

Anonyme a dit...

Il semble que vous soyez un expert dans ce domaine, vos remarques sont tres interessantes, merci.

- Daniel