En Angleterre, le résumé no. 11 du rapport hebdomadaire du service de renseignements (SHAEF G-2) fait état de la situation en France occupée :
« Le réseau ferroviaire, contrôlé par l’ennemi dans l’ouest, a subi et continue de subir des attaques d’une envergure qu’aucun système de transport n’a jamais connu, autant en intensité qu’en durée. 1,700 locomotives et 25,000 wagons ont été détruits ou mis hors fonction, même si ces résultats apparaissent impressionnants, cela ne constitue que 13 pourcents et 8 pourcents respectivement des effectifs totaux avant le début des raids. Pire encore, les Allemands ont été en mesure de remplacer le matériel par d’autre, soutiré aux civils français. Les premiers à souffrir sont les Français, leur commerce étant immanquablement réduit au profit des Allemands et leur économie déjà étouffée connaît d’autres reculs. Conséquemment, les pertes de l’ennemi ne l’empêcheront pas de déplacer du matériel et des renforts lorsque nécessaire, même si ces mouvements seront opérés moins efficacement. »
En plus du matériel roulant, le « Transportation Plan » est dirigé contre des dépôts, des plaques tournantes et des ponts. Quelques 58,000 tonnes de bombes ont été larguées sur 90 objectifs, infligeant de lourds dommages, mais malheureusement, les Allemands sont des experts en réparation. Dans la plupart des cas les dommages ont été nettoyés et les lignes rouvertes en moins de 24 heures et plus encore en dedans de 48 heures. Le rapport est plus encourageant en ce qui concerne les ponts de chemin de fer qui traversent la Seine de Paris vers la mer; 8 des 9 ponts sont détruits. Sur les 9 ponts routiers attaqués, 7 sont détruits ou partiellement endommagés. Concernant les forces allemandes, le rapport note les déplacements de nombreuses divisions allemandes en France près du littoral.
Le sous-comité conjoint du service de renseignements publie un rapport sur « L’évaluation des Allemands concernant l’intention des Alliés en ce qui a trait à Overlord » :
« Durant la dernière semaine, nous n’avons eu aucun renseignement nous permettant de croire que l’ennemi a estimé avec précision la zone de notre principal assaut. Il semble s’attendre à plusieurs débarquements entre le Pas de Calais et Cherbourg. »
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Churchill amène le général De Gaulle rencontrer Eisenhower au quartier général de Southwick House. Eisenhower lui dresse le plan de l’opération Overlord, c’est la première fois que De Gaulle est mis au courant de ce plan. De Gaulle le sermonne pendant une longue heure sur les défauts de l’opération, Eisenhower réplique qu’il aurait aimé bénéficier plus tôt des tactiques de De Gaulle, mais il est trop tard. Eisenhower lui montre une copie du discours qu’il doit prononcer au peuple de la France le jour J, pressant les français de mettre à exécution ses ordres. Il demande à De Gaulle de diffuser par la suite un discours pressant ses concitoyens à accepter les francs imprimés par le SHAEF. De Gaulle refuse, le peuple français doit lui obéir, il n’obéira pas au SHAEF, seul le gouvernement français, dont il est le président, a le droit d’émettre de la monnaie. Eisenhower le supplie, sans résultat.
Après ce malheureux gâchis, Eisenhower se rend à une conférence météorologique. Le désire de lancer l’opération dès la prochaine marée favorable est si grand et le temps si incertain, qu’il est impossible de s’attendre à ce qu’un temps parfait coïncide avec des conditions de marées appropriées. Nous devons y aller à moins qu’une véritable et très sérieuse détérioration du temps se produise. Eisenhower, ses principaux subordonnés et tous les officiers et hommes de la force expéditionnaire alliée s’entraînent, planifient et se préparent à ce moment depuis des mois. La puissante armée est tendue comme un ressort, prête pour l’instant où son énergie sera libérée pour sauter d’un bond la Manche.
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Alors que les troupes s’enregistrent sur leurs transports et barges de débarquement, on leur remet un ordre du jour de la main du général Eisenhower :
« Soldats, marins et aviateurs de la force expéditionnaire alliée, vous vous apprêter à embarquer pour la grande croisade pour laquelle nous nous évertuons depuis plusieurs mois. Le monde entier a les yeux fixés sur vous. L’espoir et les prières des amoureux de la liberté de partout sont avec vous… Votre tâche ne sera pas facile, votre ennemi est bien entraîné, bien équipé et prêt pour de durs combats. Il se battra sauvagement. Mais nous sommes en 1944! Le vent a tourné! Les hommes libres du monde marchent ensemble vers la victoire! J’ai pleine confiance en votre courage, en votre dévotion au devoir et votre adresse au combat. Nous n’accepterons que la victoire totale! Bonne Chance! Et implorons tous la bénédiction du Dieu Tout Puissant pour cette grande et noble entreprise. »
Dans la soirée les troupes des vagues d’assaut sont toutes à bord de leurs navires de transport. La force O, qui transporte la 29ème division destinée au flanc droit de la plage Omaha, a la plus longue distance à parcourir en mer. Elle partira cette nuit. Pour le général Eisenhower, « l’odeur de la victoire est dans l’air. »
En France occupée, les unités allemandes se déplacent pour renforcer le mur de l’Atlantique, du nord est vers le sud ouest. La force allemande s’est accrue de près de 20 pourcent, passant de 50 à 60 divisions dont 10 blindées. Certains de ces renforts atteignent le site de l’invasion, mais pas les divisions de Panzers.
Le général Rommel se rend à Paris afin d’acheter des souliers pour l’anniversaire, le 6 juin prochain, de sa femme Lucie. À Paris, il s’entretient avec Rundstedt qui est d’accord avec lui, « il n’y a toujours aucun signe d’une invasion imminente. » Les marées du détroit de Douvres ne conviennent pas à une invasion avant la mi-juin. Rommel consulte le rapport météorologique, on y annonce un ciel de plus en plus nuageux, de forts vents et de la pluie. Il prend la décision de se rendre à Herrlingen pour l’anniversaire de Lucie puis à Berchtesgaden afin de demander une augmentation des renforts à Hitler. Il désire deux divisions additionnelles de Panzers et le contrôle de tous les chars. Même s’il n’a présentement, selon ses calculs, que la moitié des effectifs requis en hommes, canons, mines, asperges de Rommel, obstacles de plage et positions fixes, il est pleinement confiant. Le moral est apparemment élevé tout le long du mur de l’Atlantique.
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